Groupes folkloriques : Il était une fois… La Bourrée de Paris à Nasca

Publié par Aurélie Portal le 17 juin 2012 à 17:58 (CEST) ( 453 visites )

Lundi 27 février 2012, aéroport de Paris Orly, 10h30 du matin, trente-trois danseurs et musiciens de La Bourrée de Paris s’envolent pour de nouvelles aventures…

Un voyage inoubliable commence très souvent par un périple, c’est pourquoi il nous a fallu plus de 24h pour rejoindre notre destination finale, Nasca, commune de la région d’Ica au Pérou. Et quand La Bourrée se déplace ce n’est pas de tout repos pour les bagagistes des compagnies aériennes, comptez, en plus des affaires personnelles, 2O kg de costume par personne, 10 kg d’instrument par musicien et du matériel de scène parfois très volumineux. Ces expéditions ne passent jamais inaperçus ! Et ce n’est guère mieux une fois que la joyeuse bande s’est débarrassée de son paquetage. Élément de reconnaissance : le béret, porté de préférence à l’Auvergnate bien que certaines variantes soient acceptées… A Paris chacun arbore fièrement son couvre-chef siglé des précédentes destinations de son propriétaire, plus tard il sera bien souvent délaissé au profit du fameux panama. Mais nous n’en sommes pas tout à fait là…

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Rencontres en costume...

Première escale, Madrid, nous gagnons dix degrés. Et après douze heures de vol nous découvrons Lima dans la nuit. Ses lumières nous rappellent la culture des immenses capitales de l’Amérique du sud. Deuxième escale, il est 22 heures, il fait trente degrés, nous quittons Lima. Nous sommes épuisés mais tant mieux, il reste sept heures de car jusqu’à Nasca. Sept heures sur la fameuse route Panamérica, une très longue ligne droite qui longe la côte péruvienne. Quatre heures du matin, le soleil commence à se lever, l’astre est matinal de ce côté de l’équateur !

Ce matin là, nous assistons au premier spectacle de la semaine. Le ciel est rose, la terre grise, il y a des rochers à perte de vue et rien, rien d’autre que cette modeste route. Nous pourrions croire, sans beaucoup d’imagination que notre avion n’a pas atterri mais aluni tellement le paysage est lunaire. Le dépaysement est total, il est cinq heures du matin et nous découvrons un lever de soleil sur l’un des déserts les plus arides du monde. Mais quelques bicoques nous remettent les pieds sur terre, comment des gens peuvent vivre au milieu de nulle part. En surface la terre est infertile mais son sous-sol est riche, nous apprenons qu’un bon nombre d’habitants de la région vivent de l’exploitation de quelques mines d’argent.

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« La Bourrée de Paris » à Nasca

Le trajet s’achève enfin, il est six heures quand nous entrons dans Nasca. Et quelle entrée ! Une escorte nous accueille, des gens nous saluent, d’autres scandent « Francia ! », nous comprenons qu’ici nous seront bel et bien des artistes.
Le festival de folklore Mi Perù en est à sa quatrième édition et s’est fait une renommée dans toute l’Amérique latine. La richesse historique et culturelle de ces pays explique leur intérêt particulier pour le folklore. La diversité de relief, de climat et le métissage des populations participent à la multiplicité des pas, des danses et des costumes que nous avons pu admirer. Mais ceci explique également l’ouverture d’esprit des péruviens aux traditions folkloriques du monde entier. A l’hôtel, dont le confort est exceptionnel pour cette région au climat difficile, nous croisons le premier des huit autres groupes du festival. Nous ne pouvions passés à côté des Brésiliens et de leurs percussions qu’ils ne lâchent jamais. Ils disent tous que la fête est éternelle au Brésil, c’est ce que nous avons pu vérifier : tant qu’il le peut, un Brésilien chante et danse, et ce même dans son sommeil !

Le défilé d’ouverture nous permet de rencontrer les autres délégations, l’Equateur, la Bolivie, la Colombie, l’Ile de Pâques, la Serbie, Taïwan et bien sur le Pérou. Les costumes sont magnifiques et nous faisons tous connaissance dans une effusion de couleurs. Évidemment, nous sommes vêtus le plus chaudement et ce n’est pas seulement pour la beauté de leurs corps que nous louchons sur les pagnes et les noix de coco des Chiliens du Pacifique. C’est le temps des premières photos, premières d’une très longue série. Les Péruviens sont admiratifs de nos tissus brochés et de nos perles de jais dont les couleurs sont si foncées ici qu’elles mettent en lumière nos pâles peaux que malgré tout ils ne voient pas si souvent. Les circuits touristiques ne laissent pas le temps aux étrangers d’arpenter les rues de la ville et de rencontrer leurs habitants. Pourtant, c’est en s’éloignant des sentiers battus que l’on a découvert l’essence de ce pays. C’est dans un marché local, à quelques rues de notre hôtel et de notre confort que nous avons vu le vrai Pérou. Même si la misère se fait sentir, que les vêtements et les peaux sont noircis par la poussière, les couleurs, les parfums, les sourires sont éclatants. Et ses péruviens se laissent tous prendre en photos, le soleil mettant en avant leur photogénie légendaire. Les maigres étalages de maïs, de pommes de terre et de riz nous renseignent sur notre alimentation des prochains jours. En effet, la situation de Nasca ne permet pas de garantir une grande variété de l’alimentation, néanmoins les sucres lents vont nous fournir l’énergie dont nous aurons besoin par la suite… La suite, c’est une semaine d’artistes, une riche harmonie entre défilés, répétitions et galas. Pour cela, le sérieux a régné dans les rangs de La Bourrée car chaque soir c’est un public de plus de 8000 personnes qu’il faut enchanter, leur faire découvrir notre musique, nos suites de danses bourgeoises et paysannes. La grâce de nos danses est remarquée ainsi que notre pas glissé, nos ports de tête et de bras et nos riches costumes qui nous valent la comparaison avec des poupées. Nos spectacles sont longuement applaudis et cela nous rend fiers parmi ces groupes de danseurs professionnels et ces prestigieuses écoles de danse. Nous sommes les seuls véritables amateurs, toutefois avec du travail et de la rigueur nous pouvons prendre du plaisir sans complexes à danser et à jouer dans un festival de cette ampleur.

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Sur scène...

Mais après l’effort, vient toujours le réconfort… Nous découvrons, comme promis, les richesses de la civilisation précolombienne de Nasca. La visite du cimetière de Chauchilla nous fait prendre conscience du climat si particulier de la région. Il y pleut deux à trois heures maximum par an, c’est pourquoi les corps d’hommes momifiés ont pu être conservés de manière extraordinaire pendant plus de 2000 ans. Nous ne pouvions également passer à côté des fameuses lignes de Nasca sans monter au seul mirador qui permet de les observer de la Terre. C’est encore une fois la sécheresse désertique qui a pu garantir la conservation de ce site millénaire. Le mystère qui plane autour de l’élaboration par les Incas de ses immenses dessins visibles uniquement du ciel, participe à l’impression particulière qui se dégage de cet endroit.

Mais le réconfort passe également par la détente : se baigner dans l’eau « réfrigérante » de l’océan, admirer ses paysages inoubliables où le désert se jette dans la mer puis danser sur la plage jusqu’à en perdre haleine. Et si la langue peut être parfois une barrière, la danse, elle, est universelle et assure de passer ensemble des moments inoubliables.

Après cinq galas et des milliers de spectateurs, vient le temps de clôturer le festival en défilant dans toute la ville afin de rencontrer au plus près les habitants et les remercier de leur accueil. Ce fut l’un des moments les plus émouvants du séjour. Voir cette population, isolé du reste du monde, en liesse, ne cachant pas le plaisir de nous voir et de nous toucher. C’est ainsi, dans une rue poussiéreuse de Nasca que nous prenons tous conscience qu’être là, se costumer, jouer, chanter, danser, était la plus belle des choses que l’on pouvait offrir à ces gens, juste un peu de divertissement, une manière d’oublier et de relativiser tous nos soucis. Ce soir là nous leur donnions, avec encore plus d’émotion, notre dernier spectacle.
Il est déjà temps de rentrer, mais pas avant une petite escale dans la capitale. En compagnie des autres groupes, nous sommes reçus à la mairie afin de nous remercier de notre présence et de notre participation. A cette occasion, Thierry Borrel, président de La Bourrée de Paris, a pu prendre la parole pour dire notre joie d’avoir découvert le Pérou et surtout les Péruviens qui, comme il a su si bien le dire, ont « le cœur aussi chaud que leur soleil ! »

Nos fidèles guides nous ont ensuite dévoilé les richesses de Lima, des villas coloniales du centre historique aux riches bâtiments administratifs, des favelas avoisinantes jusqu’au marché d’art artisanal, ce fut une journée pleine de surprises. Puis, l’aéroport international, où nous accompagna le président du festival, son épouse ainsi que tout le groupe péruvien, fut le théâtre des félicitations et des étreintes. C’est alors qu’au milieu des bagages, dans un moment d’émotion intense nous nous sommes dit au revoir en nous faisant la promesse, ici ou là, de nous revoir très bientôt.
Pour conclure, je terminerai par citer Thierry Borrel qui résuma notre aventure comme ceci :

« Le succès d’un festival ne réside pas uniquement dans sa qualité artistique mais surtout dans l’émotion qu’il dégage. Pour La Bourrée de Paris, le festival Mi Perù 2012 fut un immense succès ! »